Âgisme
Ce sont surtout les personnes jeunes qui sont médiatisées. Au-delà de cinquante ans, plus une personne est âgée, moins elle sera représentée. Lorsque des personnes âgées sont mises en scène, ce n’est hélas pas toujours positif. Les médias et la publicité les représentent selon des préjugés et des stéréotypes négatifs.
Synonyme : discrimination fondée sur l’âge.
L’exclusion des personnes en fonction de leur âge.
La norme de la jeunesse
L’absence des personnes âgées dans les médias en dit long sur ce que nous croyons être important. En Occident, la jeunesse et le dynamisme sont valorisés.
Les personnes âgées n’ont pas leur place dans ce tableau jeune et lisse. On les considère comme bornées, moins compétentes que les jeunes et en mauvaise santé. Leur utilité sociale est questionnée. L’actualité en particulier met l’accent sur leur coût pour la société : en termes de pensions, de soins de santé, de maisons de repos…
![[description]](https://zorrola.be/fr/wp-content/uploads/2020/02/ouderevrouw-skydive-1024x576-1.jpg)
Pour le marketing, les personnes âgées ne sont plus curieuses. Elles restent fidèles à une marque et ne prennent plus de risques. Les jeunes aiment la variété et sont donc la cible idéale pour vendre de nouveaux produits et services.
Mettre en scène des mannequins seniors dissuade les jeunes consommateurs, selon le marketing. Les jeunes veulent pouvoir s’identifier à leurs pairs.
C’est pourquoi on voit plus de jeunes que de seniors dans la publicité.
![[description]](https://zorrola.be/fr/wp-content/uploads/2020/02/Denim-Jeans-older-couple.jpg)
Il est possible que les seniors soient représenté·e·s de façon transgressive. Car les images choquantes attirent l’attention d’un public jeune.
Autre possibilité : raconter une histoire de “nous” contre “les autres”. On montre que “les autres” (les personnes âgées) sont moins que compétentes que le public cible jeune (“nous”). Ou bien on met en scène d’une façon comique leur mémoire défaillante (comme certaines pubs IT pour les tablettes, les smartphones… ).
Parfois, la pub met en scène des seniors dans une histoire typique d’“avant” et d’“après”. Ils et elles incarnent alors l’“avant”. Une vie ennuyeuse et apathique peut être échangée contre une vie excitante et aventureuse à l’achat du produit promu. Le ton envers les personnes âgées est souvent condescendant, parfois même insultant.
C’est ainsi que la pub maintient l’idée que les jeunes (« nous ») sont meilleurs que les personnes âgées (“les autres »). Ce groupe est flexible, dynamique, motivé et compétent en matière de nouvelles technologies, tandis que le second est dépassé.
Image déformée
Les seniors dans la publicité sont mis en scène pour promouvoir des produits qui intéressent un public cible du même âge (monte-escaliers, déambulateurs, couches pour adultes, dentiers…). Mais le comble est que ces produits sont présentés par des modèles plus jeunes que le public visé.
![[description]](https://zorrola.be/fr/wp-content/uploads/2020/02/AG-pic-rollator-gemino-reclame-2-1024x535-1.jpg)
Ainsi, dans la publicité, des modèles plus jeunes promeuvent des compléments alimentaires pour la mémoire, des prothèses dentaires ou des aides à la mobilité.
Or les seniors ne se reconnaissent pas dans ces images de jeunes. Car la plupart n’ont pas (encore) besoin de ces articles.
La génération actuelle de seniors est plus en forme et en meilleure santé qu’auparavant. Pourtant des personnes âgées en bonne santé et socialement utiles figurent rarement dans les pubs. Or dans la réalité, elles s’occupent des petits-enfants, sont nombreuses à faire du bénévolat dans des associations, etc.
En bref, l’image que les jeunes se font des personnes plus âgées ne correspond pas à la réalité. Elle est négative, peu ambitieuse (voir aspirationnel). En outre, le peu de personnes âgées médiatisées sont blanches. On ne voit presque pas de personnes âgées issues de l’immigration. Et quand on en voit, ce sont majoritairement des hommes valides.
Deux poids, deux mesures
![[description]](https://zorrola.be/fr/wp-content/uploads/2020/02/nespresso-george-clooney.jpg)
Un homme ridé rayonne d’expérience et de sagesse, fait preuve de classe et de luxe. Dans la publicité, les hommes plus âgés sont synonymes de succès. Ils promeuvent des produits luxueux, comme des montres et des voitures de sport.
Les femmes âgées, elles, sont boudées par les médias.
![[description]](https://zorrola.be/fr/wp-content/uploads/2020/02/oud-meubel.jpg)
Une femme ridée est considérée comme “périmée”. Vieillir n’est pas souhaitable puisqu’il faut que les femmes restent éternellement jeunes.
![[description]](https://zorrola.be/fr/wp-content/uploads/2020/02/age-perfect-Jane-fonda.jpg)
Ce double standard pour les hommes et les femmes signifie que les femmes âgées sont davantage sous-représentées que les hommes âgés dans la publicité. Elles sont par exemple cantonnées aux cosmétiques antirides, pour vieillir gracieusement et garder une peau lisse parfaite.
Quels préjudices ? Pour qui ?
Rayer les personnes âgées des médias, c’est faire comme si elles n’existaient pas. Les présenter de manière négative, c’est leur ôter leur valeur. Une situation préjudiciable, tant pour les jeunes que pour les moins jeunes. D’une part, cela donne lieu à des comportements biaisés ou discriminatoires. D’autre part, cela conduit à l’intériorisation.
Comportements préjudiciables
La surreprésentation médiatique des jeunes survalorise la jeunesse au détriment de la vieillesse, qui a contrario est perçue comme un état négatif, à dissimuler. Présenter les personnes âgées comme des personnes incompétentes entraîne une baisse des attentes.
Cela encourage la discrimination fondée sur l’âge. Sur le lieu de travail en cas de recrutement, de promotion, d’augmentation de salaire et de formation. Mais aussi à la maison ou dans des maisons de repos où il peut y avoir un patronage parental. On a alors tendance à infantiliser les personnes âgées dans la manière de leur parler et de décider à leur place.
Cela peut également avoir de graves conséquences médicales. Par exemple, quand on estime qu’opérer une personne âgée coûte trop cher à la sécurité sociale. Ou lorsque la douleur chez les personnes âgées n’est pas suffisamment prise au sérieux, en raison de l’hypothèse selon laquelle la douleur ferait partie du vieillissement.
Dans le pire des cas, l’idée que les personnes âgées sont “condamnées” encourage la maltraitance à leur égard. Ou la normalisation de celle-ci. L’indifférence en effet est une des causes du manque de signalements des abus sur les personnes âgées.
La sous-représentation médiatique des personnes âgées leur signifie qu’elles ne comptent pas, qu’elles ne sont plus désirées. Idem quand elles sont présentées comme incapables. Ceci confirme le modèle de déficit.
Par conséquent, les personnes âgées croient qu’elles ne sont plus bonnes à rien dans la société, on les pousse à croire qu’elles sont physiquement et intellectuellement plus faibles que ce qu’elles ne sont en réalité.
C’est ainsi qu’elles reçoivent l’image que les médias leur renvoient. Elles ont tendance à ne plus voir leurs possibilités. Ceci peut conduire à une dépendance précoce, à la perte de la joie de vivre, à tomber malade plus souvent et se rétablir moins vite. Dans les cas les plus graves, cela peut entraîner un état dépressif et affecter l’espérance de vie.
Les préjudices touchent même les quinquagénaires. Sur le marché du travail, les travailleurs et travailleuses craignent d’être licencié·e·s au profit de quelqu’un plus jeune. Ou de ne pas retrouver de travail après un licenciement. Cette intériorisation, associée à un manque d’appréciation au travail, peut entraîner une augmentation du stress et de l’épuisement professionnel.
Les personnes dès l’âge de cinquante ans sont affectées par l’image que les médias leur véhiculent. Elles ne voient pas toujours les opportunités qui s’offrent encore à elles. Ainsi elles peuvent laisser passer des opportunités de promotion ou de programmes de formation.
![[description]](https://zorrola.be/fr/wp-content/uploads/2020/02/2019-fr-campagne-lutte-agisme.fr_.jpg)
Discriminer la personne qu’on deviendra
L’âgisme oppose les générations les unes aux autres, les sépare et brise la solidarité entre elles. De plus, l’absence d’images positives de la vieillesse perpétue la peur de vieillir.
Cela fait de l’âgisme la seule forme de discrimination qui n’est pas exclusivement dirigée contre l’“autre”. Puisqu’en fin de compte, l’âgisme est dirigé contre soi-même. Beaucoup de personnes vieilliront un jour. Donc discriminer une personne âgée équivaut à discriminer la personne que l’on deviendra tôt ou tard.
![[description FR]](https://zorrola.be/nl/wp-content/uploads/2019/09/ad-volkswagen-touran.jpg)
Publicité pour les seniors
Entre-temps, le marketing a trouvé auprès des seniors un nouveau marché. Car les gens vieillissent mieux et en étant en meilleure santé qu’auparavant. Et certains bénéficient aussi d’un pouvoir d’achat. Donc si on veut leur vendre quelque chose, on doit présenter les seniors de manière positive. Ni bornés, ni grincheux, mais vifs, séduisants et sexuellement actifs, comme le sont la plupart des personnes âgées.
Mais les images positives restent encore rares. Les personnes âgées vivent pourtant 7,5 ans de plus, selon les recherches.
La question reste cependant de savoir si l’utilisation commerciale d’une personne âgée ultra performante se révèle une bonne ou une mauvaise chose. Prenons la publicité “The Iron Nun” de Nike. Pour les jeunes téléspectateurs, une publicité pour une marque de sport avec une femme triathlète de 86 ans est sans aucun doute inspirante. Mais en est-il de même pour un public plus âgé ? Cela reste encore à étudier.
Enfin, l’humour ne défavorise pas toujours les personnes âgées.
Il peut aussi briser les stéréotypes, comme dans la publicité de Volkswagen. On y voit un père et son fils certains d’avoir fait une bonne affaire en achetant une voiture d’occasion à une respectable vieille dame… à première vue.
Sources
Brodmerkel, S., & Barker, R. (2019). Hitting the ‘glass wall’: Investigating everyday ageism in the advertising industry. The Sociological Review, 67(6), 1383-1399.
Carrigan, M., & Szmigin, I. (2003). Regulating ageism in UK advertising: an industry perspective. Marketing Intelligence & Planning.
Jackson, S. E., Hackett, R. A., & Steptoe, A. (2019). Associations between age discrimination and health and wellbeing: cross-sectional and prospective analysis of the English Longitudinal Study of Ageing. The Lancet Public Health, 4(4), e200-e208.
Kessler, E. M., Schwender, C., & Bowen, C. E. (2009). The portrayal of older people’s social participation on German prime-time TV advertisements. Journals of Gerontology Series B: Psychological Sciences and Social Sciences, 65(1), 97-106.
Lepianka, D. (2015). How similar, how different? On Dutch media depictions of older and younger people. Ageing & Society, 35(5), 1095-1113.
Lumme-Sandt, K. (2011). Images of ageing in a 50+ magazine. Journal of Aging Studies, 25(1), 45-51.
Martens, S. (2012). L’utilisation de l’image des aînés dans la mode et la publicité : regard sur un phénomène. Analyses Énéo, 2012/15.
Sargent-Cox, K. (2017). Ageism: we are our own worst enemy. International psychogeriatrics, 29(1), 1-8.
Zhang, Y. B., Harwood, J., Williams, A., Ylänne-McEwen, V., Wadleigh, P. M., & Thimm, C. (2006). The portrayal of older adults in advertising: A cross-national review. Journal of Language and Social Psychology, 25(3), 264-282.
Internetbron: Onderzoek Stijn Baert (UGent) en vacature.com: deze drempels ervaren 50-plussers op de arbeidsmarkt.
FACT CHECK
Ce texte a été rédigé avec soin en s’appuyant sur plus de sources que nous ne pouvons en mentionner ici. Si vous lisez quelque chose qui ne correspond pas ou plus à l’état actuel de la recherche scientifique, n’hésitez pas à nous contacter.


